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26/10/2018

La chasse à courre

Je me souviens de ce passage de quelques jours, en primaire, chez un correspondant en tous points différent de mon environnement, vers Bourges. Une belle ville, dans mon souvenir, un peu désuète, au milieu de laquelle une impressionnante cathédrale, que nous avions visité, certains chahutant un peu trop au gré de la guide ; nous qui avions la réputation de venir d'une région où les nombreux calvaires inspirent le respect, elle était visiblement choquée et déçue de nous. Au retour, nous avions composé avec nos camarades quelques planches avec des cartes postales commentées par des écrits de notre âge sur ce séjour. Autour de Bourges, c'était plat, avec des champs immenses, des champs d'une taille que je n'aurais pas imaginé, sans talus, cultivés sur des kilomètres avec des tracteurs gigantesques. Je me sentais perdu, sans repère, chez mon correspondant. Au milieu de la salle à manger, des têtes d'animaux empaillés, dans le couloir aussi. Le père était amateur de chasse à courre. Nous étions allés une après-midi l'accompagner, nous étions restés des heures dans un grand manoir à nous ennuyer. Des cris de chiens, de cors, des voix gueulantes à l'allée et au retour. Je ne savais rien quoi dire parmi eux, la plupart du temps, je me tenais à carreau. Un jour, à la maison, mon correspondant fut appelé par sa mère en colère, pour une raison que j'ignore. J'étais resté dans la cuisine, consigné à attendre, et je l'entendis gronder, et l'autre se débattre, ou faire semblant, puis j'entendis claquer les coups de fouet, et les cris de douleur, ou à moitié de plaisir je ne saurais dire. Cuisant. Nous n'en n'avons pas dit un mot ensuite, comme si rien ne s'était passé. Je garde un souvenir étrange de ce passage, comme s'il s'était agi d'un autre monde dont je ne connaissais rien, et qui m'apparût crûment.