Poèmes politiques posthumes de Manuel José Arce (traduits en français par Laurent Bouisset)
30/09/2015
" Manuel José Arce est un poète et dramaturge guatémaltèque né en 1935. Il est notamment l'auteur de la pièce de théâtre grotesque et édifiante : Condena y ejecución de une gallina (Condamnation et exécution d'une poule), mais on pourrait également citer Sebastián sale de compras ou encore Compermiso, textes de combat essentiels sachant aller à la critique marxiste un comique virulent. Contraint à l'exil politique au début des années 80, il a trouvé refuge en France, où il a rédigé ces cinq poèmes terribles contre (entre autre) Efraín Ríos Montt, pasteur évangéliste et général (!) s'étant vu condamner en 2013 à 50 années de prison ferme pour génocide du peuple maya et 30 ans supplémentaires pour crimes contre l'humanité, avant que le jugement ne soit cassé par la Cour constitutionnelle pour des raisons « obscures ». Il reste à préciser, même si cela paraît aller de soi, que ces cinq textes ont été censurés à l'époque par le régime, avant d'être enfin publiés mais à titre posthume, un cancer du poumon ayant eu raison de l'auteur à Albi, en 1985. "
1. General
General
—no importa cuál,
da lo mismo,
es igual—:
Para ser General,
como usted, General,
se necesita
haber sido nombrado General.
Y para ser nombrado General,
como usted, General,
se necesita
lo que usted no le falta, General.
Usted merece bien ser General,
llena los requisitos, General.
Ha bombardeado aldeas miserables,
ha torturado niños
ha cortado los pechos de las madres
rebosantes de leche,
ha arrancado los testículos y lenguas,
uñas y labios y ojos y alaridos.
Ha vendido mi patria
y el sudor de mi pueblo
y la sangre de todos.
Ha robado, ha mentido, ha saqueado,
ha vivido
así, de esta manera, General.
General
—no importa cuál—:
para ser General,
como usted, General,
hay una condición fundamental:
ser un hijo de puta,
General.
-
1. Général
Général
– et peu importe lequel,
ça ne change rien,
c'est parfaitement indifférent – :
Pour être Général
comme vous, mon Général,
il faut d'abord
avoir été nommé Général.
Et pour être nommé Général,
comme vous, mon Général,
il faut avoir en soi
ce dont vous ne manquez pas, mon Général.
Amplement, vous le méritez, d'être Général,
amplement, vous les remplissez, tous les critères.
Vous avez bombardé des hameaux misérables
vous avez torturé des enfants
vous avez tranché la poitrine des mères
qui débordaient de lait,
vous avez arraché les testicules et les langues,
les yeux, les ongles et lèvres et quantité de hurlements.
Vous avez vendu ma patrie,
la sueur de mon peuple
et notre sang à tous.
Vous avez volé, menti, pillé,
vous avez bel et bien vécu
ainsi, de cette manière, mon Général.
Général,
– et peu importe lequel – :
pour être Général,
comme vous, mon Général,
il est une condition fondamentale :
être un vrai fils de pute,
mon Général.
*
2. Sermón presidencial
Paso el Ejército
y del dulce pueblito que antes era
atractivo turístico
en las postales multicoloridas,
no quedo piedra sobre piedra
ni quien para contarlo:
se encontró los cadáveres de mujeres preñadas
con el feto asomado por la herida del vientre.
Se encontró a muchachitos de cinco años y menos
colgados de las tripas en las ramas de un árbol.
Los ancianos del pueblo,
venerables,
estaban decapitados en la plaza frente a la iglesia.
No quedaba ni quien para contarlo.
Ni los perros.
Y la prensa, la radio y la televisión
repetían, hoy lunes, el sermón del domingo
del Señor Presidente
—general y pastor evangelista—,
que comenzó diciendo:
"Dios es Amor, hermanos..."
-
2. Sermon présidentiel
L'armée passa
et du petit village paisible qui
séduisait avant ça les touristes
sur cartes postales multicolores,
il ne resta pas une pierre en l'état,
ni personne pour le raconter :
on retrouva les cadavres de femmes enceintes
avec leur fœtus s'échappant d'une blessure au ventre.
On retrouva des gosses de cinq ans et moins
pendus par les tripes aux branches d'un arbre.
Les anciens du village,
les vénérables,
avaient la tête tranchée sur la place de l'église.
Il ne restait plus même une voix pour raconter tout ça.
Plus seulement un chien.
Et la presse, la radio et la télévision
répétaient, aujourd'hui lundi, le sermon du dimanche
de sa Majesté Président
– général et pasteur évangéliste –
qui avait commencé en nous disant :
« Dieu est Amour, mes frères... »
*
3. Mapa con una piedra
Aquí queda el océano: los pesqueros que abandono Somoza.
Aquí, la costa: el algodón, bananos, caña de azúcar, caucho,
cacao, ganado y paludismo.
Mas acá, el altiplano, las fincas de café y de cardamomo.
Y mas acá, hasta arriba, se encuentran la montaña y las tierras
estériles.
Y en esta aldea miserable de indios
—de indios que en la cosecha bajan al altiplano o a la costa,
en camiones de vaca, con toda la familia, por salarios que ya
ni madre tienen.
a labrar los millones que se quedan
en bancos y burdeles de Miami;
de indios que van cargando a mecapal la historia—
en esta aldea, digo,
en este simple patio de tierra apisonada,
un niño juega con una piedra.
Con una piedra.
Con una sola piedra.
El silencio, de pronto, decapita la canción de los pájaros.
Y el niño sigue jugando con una piedra.
Los arboles presienten el peligro. El maíz se acongoja en la
mazorca.
Hay un temblor de muerte en los celajes. El agua se detiene
en el cauce del río.
Y los perros esconden el olfato. Pero el niño
en el patio
esta jugando con una piedra.
Es un ruido en pedazos que se oye desde lejos,
retaceado,
indeciso.
Viene como cortando con hachazos metódicos el aire.
Las mujeres levantan la mirada
y corren con un niño en el pecho, y otro niño en la espalda y
otro niño en el vientre,
y un niño mas colgando en cada brazo.
Los viejos sacan fuerzas de flaqueza, escarban en los reumas
hasta hallar los pedazos
de energía que quedan y corren o se arrastran mas bien.
Los helicópteros están sobre los ranchos, las casas, las calles,
y los patios.
Las llamas de napalm roen los techos de amable paja,
el campanario de la iglesia estalla,
los perros cabalgados por el fuego revientan en aullidos,
el paisaje se borra en el humazón caliente.
Vuelven los helicópteros.
Esta vez se declara el aguacero torrencial de balazos,
las cortinas que vienen barriendo lo que queda de vida entre
las brasas
y acosando en seguida la montaña
donde los trajes imperiales de las mujeres sirven de objetivo
seguro.
—perseguido-encontrado-perseguido-encontrado y alcanzado—
por la eficacia de los artilleros.
Y el niño esta en el patio sin su piedra.
Termino el juego
cuando aun tuvo tiempo de lanzarla
contra los helicópteros.
En este mapa ardiente que describe mi patria
ya no existen niños:
desde que el hombre nace, nace adulto.
Adulto y combatiente.
-
3. Carte avec une pierre
Ici, l'océan : les bateaux de pêche qu'abandonna Somoza.
Ici, la côte : le coton, les bananes, la canne à sucre, le caoutchouc,
le cacao, le bétail et le paludisme.
Par là, l'altiplano, les exploitations de café et de cardamone.
Et par là, jusqu'en haut, les versants montagneux et terres stériles.
Et dans ce hameau misérable d'indiens
–d'indiens descendant récolter jusqu'à l'altiplano, ou même la côte,
la famille entière entassée dans des fourgons à bestiaux, pour des salaires
qu'ils finissent par ne toucher plus qu'en rêve.
tous à bûcher pour les millions qui resteront
dans les banques et bordels de Miami ;
d'indiens charriant sur leurs épaules fourbues l'histoire–.
dans ce hameau, vous dis-je,
dans ce simple patio de terre damée,
un enfant joue avec une pierre.
Avec une pierre.
Avec une seule pierre.
Le silence soudain décapite la chanson des oiseaux.
Et l'enfant continue à s'amuser avec une pierre.
Les arbres pressentent le danger. Le maïs se rétracte
dans l'épi.
Un tremblement de mort parcourt les cieux. L'eau s'immobilise
dans le lit de la rivière.
Et les chiens cachent leur flair. Mais l'enfant
dans le patio
continue à jouer avec une pierre.
Un bruit haché se fait entendre dans le lointain,
entrecoupé,
comme hésitant.
Il semble arriver taillant l'air à coups de hache méthodiques.
Les femmes lèvent les yeux au ciel
et prennent la fuite, un enfant collé à leur sein,
un autre enfant arrimé sur le dos, un autre encore
est dans le ventre, un de plus dans chaque bras.
Les vieux grappillent des forces à leur faiblesse, grattent leurs rhumatismes
jusqu'à dénicher les lambeaux
d'énergie subsistant et courent, ou non, plutôt ils rampent.
Les hélicoptères survolent les fermes, les maisons, les rues
et les patios.
Le napalm en feu ronge les toits de paille aimable,
le clocher de l'église éclate,
les chiens, chevauchés par les flammes, hurlent à la mort,
le paysage s'efface, envahi par la fumée chaude.
Retour des hélicos.
Début de la pluie torrentielle de balles.
Les rideaux maintenant balaient ce qui reste de vie entre
les braises,
puis ils vont ratisser, après ça, la montagne,
où les vêtements colorés des femmes servent aux
tireurs d'objectif sûr.
–traqué-trouvé-traqué-trouvé puis atteint–
par l'efficacité des artilleurs.
Et le gamin dans le patio n'a plus sa pierre.
Il a dû mettre un terme au jeu
après avoir quand même trouvé le temps
de la jeter sur les hélicoptères.
Sur la carte embrasée qu'est devenue ma patrie
il n'y a plus d'enfants :
sorti du ventre à peine, on est adulte.
Adulte et combattant.
*
4. La hora de la siembra
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Recibimos el golpe en la mejilla,
la patada en la cara.
Y pusimos la otra mejilla,
silenciosos y mansos,
resignados.
Entonces comenzaron los azotes,
comenzó la tortura.
Llego la muerte.
Llego noventa mil veces la muerte.
La labraban despacio,
riéndose,
con alegría de nuestro sufrimiento.
Ya no se trata solo de nosotros los hombres.
El saqueo constante de nuestras energías,
el robo permanente del sudor
—en cuadrilla, a mano armada, con la ley de su parte—.
Ya no se trata solo de la muerte por hambre.
Ya no se trata solo de nosotros los hombres.
También a las mujeres,
a los hijos,
a nuestros padres y a nuestras madres.
Los violan, los torturan, los matan.
También a nuestras casas,
las queman.
Y destruyen las siembras.
Y matan las gallinas, los marranos, los perros.
Y envenenan los ríos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Trabajábamos.
Trabajábamos mas allá de las fuerzas.
Empezábamos a trabajar cuando aprendíamos a caminar
y no nos deteníamos sino al momento de morirnos.
Nos moríamos de viejos a los treinta años.
Trabajábamos.
El sudor era un río que se bifurcaba:
de un lado se volvía miseria, fatiga y muerte para nosotros:
de otro lado, riqueza, vicio y poder para ellos.
Sin embargo,
seguimos trabajando y muriendo siglo tras siglo.
Pero ni aun así se ablandaban sus caras frente a nosotros.
Vinieron con sus armas
y sus armas vinieron a matarnos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y hemos tenido que empuñar las armas
también nosotros.
Al principio eran las piedras,
las ramas de los arboles.
Luego, los instrumentos de labranza,
los azadones, los machetes, las piochas,
nuestras armas.
Nuestro conocimiento de la tierra,
el paso infatigable,
nuestra capacidad de sufrimiento,
el ojo que conoce y reconoce cada hoja,
el animal que avisa,
el silencio que aprieta las quijadas.
Esas fueron primero nuestras armas.
No teníamos armas.
Ellos si que tenían:
las compraban con nuestro trabajo
y luego las usaban contra nosotros.
Ahora tenemos armas:
las de ellos.
Cuando vinieron nocturnos a matarnos
les salimos al paso,
caemos como rayos
y tomamos las armas,
agarramos las armas.
Cada fusil cuesta muchas vidas.
Pero son mas las muertes que nos cuesta
si sigue en manos de ellos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Porque esta vez
las cosas
van a cambiar definitivamente.
Están cambiando.
Ya cambiaron.
Cada bala que disparamos lleva
la verdad del amor por nuestros hijos,
por nuestras mujeres y nuestros mayores
y por la tierra misma y por sus arboles.
Y por eso hay mujeres y niños combatiendo junto a nosotros.
Cuando sembramos el maíz,
sabemos que deberán pasar lunas y soles
hasta que la mazorca sonría con sus granos y se vuelva alimento.
Y cuando disparamos nuestras armas
es como si sembráramos
y sabemos
que deberá venir una cosecha.
Tal vez no la veamos.
Tal vez no comeremos nuestra siembra.
Pero quedan sembradas las semillas.
Las balas que ellos tiran solo llevan muerte.
Nuestras balas germinan,
se vuelven vida y libertad,
son metal de esperanza.
Las cosas han cambiado.
Y esta bien que así sea.
Hemos limpiado y aceitado el arma.
Echamos las semillas en la alforja y emprendemos la marcha
serios y silenciosos por entre la montaña.
Es la hora de la siembra.
-
4. L'heure de semer
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous avons reçu le poing dans la joue,
le coup de pied dans la figure.
Et nous avons tendu l'autre joue,
silencieux et dociles,
résignés.
Alors ont commencé les coups de fouet,
puis la torture.
La mort est arrivée.
Quatre-vingt-dix mille fois la mort est arrivée.
Ils la distribuaient à petit feu,
en se marrant,
n'oubliant pas de jouir de notre souffrance.
Il n'est plus question seulement de nous les hommes.
Le pillage constant de nos énergies,
le vol permanent de la sueur
– en escadrons, la main armée, avec la loi de leur côté –.
Il n'est plus question seulement de mourir de faim.
Plus question seulement de nous les hommes.
Les femmes également,
les enfants,
nos pères et mères.
Ils les violent, ils les torturent, ils les tuent.
Nos maisons aussi,
ils les brûlent.
Et ils détruisent les plantations.
Et ils tuent les poules, les cochons, les chiens.
Et ils empoisonnent les rivières.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous travaillions.
Nous travaillions au-delà de nos forces.
Nous commencions à travailler quand nous apprenions à marcher
et jamais ne nous arrêtions jusqu'à l'article de la mort.
Nous mourions de vieillesse à l'âge de trente ans.
Nous travaillions.
Le fleuve de la sueur se séparait en deux :
d'un côté, il devenait misère, fatigue et mort pour nous :
de l'autre, il devenait richesse, vice et pouvoir pour eux.
Cependant,
nous avons continué à travailler, siècle après siècle.
Mais leurs traits, face à nous, ne se sont pas adoucis pour autant.
Ils sont venus avec leurs armes
et leur armes sont venues pour nous tuer.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et nous avons dû empoigner les armes aussi,
nous autres.
Au début il y avait les pierres,
les branches des arbres.
Les outils de travail du sol, bientôt.
Bêches, machettes et pioches,
nos armes.
Le savoir de la terre,
le pas infatigable,
notre capacité d'endurance,
l’œil qui connaît et reconnaît chaque feuille,
l'animal qui avertit,
le silence qui serre les mâchoires.
Voilà quelles ont été nos premières armes.
Nous n'avions pas d'armes.
Eux qui, par contre, en possédaient,
les achetaient à la sueur de notre travail
et les utilisaient, après ça, contre nous.
Maintenant nous avons des armes :
les leurs.
Quand ils sont venus nous tuer, en pleine nuit,
nous sommes passés à la contre-offensive,
nous surgissons comme des rayons
et nous prenons les armes,
nous empoignons les armes.
Combien de nos vies arrachées pour un fusil ?
mais le prix est plus grand encore en morts,
si l'arme demeure à leur poing.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Parce que cette fois-ci
les choses
vont changer définitivement.
Elles sont en train de changer.
Elles ont déjà changé.
Au fond de chacune des balles que l'on tire
vibre l'amour sincère de nos enfants,
de nos femmes et de nos anciens,
de la terre vénérée et de ses arbres.
C'est pour cela que des femmes, des enfants combattent à nos côtés.
Quand nous semons le maïs,
nous savons que passeront plusieurs lunes, plusieurs soleils,
avant que l'épi ne sourie avec ses grains, devenu pour nous aliment.
Et quand nous tirons des coups de feu,
c'est comme si nous semions,
et nous savons
que viendra forcément une récolte.
Peut-être que nous ne la verrons pas.
Peut-être que nous ne mangerons pas le fruit de nos semailles.
Mais les graines restent en terre, prêtes à éclore.
Leurs balles à eux apportent la mort.
Les nôtres germent,
deviennent vie et liberté,
sont métal d'espérance.
Les choses ont changé.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous avons lavé et huilé l'arme.
Nous jetons les graines dans nos sacoches et commençons la marche
sérieuse et silencieuse dans la montagne.
C'est l'heure maintenant de semer.
*
5. Equis-equis
- No, no es él.
- Sí, sí es él.
- No, no es él. No es posible que esto pueda ser él.
- Mira la cicatriz de la vacuna.
- No, no es él.
- Mira la corona de la muela que le puso Miguel
hace seis meses.
- No, no es él.
- Yo pienso que sí es él. Que esta vez si es él.
- No, no es él.
Como podría ser él si no tiene ojos.
Como podría ser él si no tiene sus manos laboriosas.
Como podría ser él si le han cortado sus semillas de hombre.
Como podría ser él sin su guitarra ni su canción,
sin aquel ceño duro ante el peligro, sin aquella sonrisa en el
trabajo.
sin su voz pronunciando el pensamiento, sin su tonta manía
de regalarme flores.
Como podría ser él.
No es él. Te digo que no es él.
No quiero que sea él.
-
5. Double x (corps non-identifié)
- Non, c'est pas lui.
- Si, c'est lui.
- Non, c'est pas lui. C'est pas possible que ce soit son corps, là.
- Regarde, on voit la cicatrice de son vaccin.
- Non, c'est pas lui.
- Mais si, c'est la couronne que Miguel lui a mise, il y a six mois.
- Non, c'est pas lui.
- Moi, je crois bien que, cette fois, si, c'est lui.
- Non, c'est pas lui.
Comment tu peux dire que c'est lui, s'il n'a même plus ses yeux.
Comment tu peux dire que c'est lui, s'il a perdu ses mains de travailleur.
Comment tu peux dire que c'est lui, sans sa guitare et ses chansons,
sans son sourcil durci face au danger, sans le sourire qui
lui venait en travaillant.
sans le son de sa voix prononçant sa pensée, sans sa manie stupide
de m'offrir des fleurs.
Comment tu veux que ce soit lui.
C'est pas lui. Je te le dis : non, c'est pas lui.
Je ne veux pas que ce soit lui.
1. General
General
—no importa cuál,
da lo mismo,
es igual—:
Para ser General,
como usted, General,
se necesita
haber sido nombrado General.
Y para ser nombrado General,
como usted, General,
se necesita
lo que usted no le falta, General.
Usted merece bien ser General,
llena los requisitos, General.
Ha bombardeado aldeas miserables,
ha torturado niños
ha cortado los pechos de las madres
rebosantes de leche,
ha arrancado los testículos y lenguas,
uñas y labios y ojos y alaridos.
Ha vendido mi patria
y el sudor de mi pueblo
y la sangre de todos.
Ha robado, ha mentido, ha saqueado,
ha vivido
así, de esta manera, General.
General
—no importa cuál—:
para ser General,
como usted, General,
hay una condición fundamental:
ser un hijo de puta,
General.
-
1. Général
Général
– et peu importe lequel,
ça ne change rien,
c'est parfaitement indifférent – :
Pour être Général
comme vous, mon Général,
il faut d'abord
avoir été nommé Général.
Et pour être nommé Général,
comme vous, mon Général,
il faut avoir en soi
ce dont vous ne manquez pas, mon Général.
Amplement, vous le méritez, d'être Général,
amplement, vous les remplissez, tous les critères.
Vous avez bombardé des hameaux misérables
vous avez torturé des enfants
vous avez tranché la poitrine des mères
qui débordaient de lait,
vous avez arraché les testicules et les langues,
les yeux, les ongles et lèvres et quantité de hurlements.
Vous avez vendu ma patrie,
la sueur de mon peuple
et notre sang à tous.
Vous avez volé, menti, pillé,
vous avez bel et bien vécu
ainsi, de cette manière, mon Général.
Général,
– et peu importe lequel – :
pour être Général,
comme vous, mon Général,
il est une condition fondamentale :
être un vrai fils de pute,
mon Général.
*
2. Sermón presidencial
Paso el Ejército
y del dulce pueblito que antes era
atractivo turístico
en las postales multicoloridas,
no quedo piedra sobre piedra
ni quien para contarlo:
se encontró los cadáveres de mujeres preñadas
con el feto asomado por la herida del vientre.
Se encontró a muchachitos de cinco años y menos
colgados de las tripas en las ramas de un árbol.
Los ancianos del pueblo,
venerables,
estaban decapitados en la plaza frente a la iglesia.
No quedaba ni quien para contarlo.
Ni los perros.
Y la prensa, la radio y la televisión
repetían, hoy lunes, el sermón del domingo
del Señor Presidente
—general y pastor evangelista—,
que comenzó diciendo:
"Dios es Amor, hermanos..."
-
2. Sermon présidentiel
L'armée passa
et du petit village paisible qui
séduisait avant ça les touristes
sur cartes postales multicolores,
il ne resta pas une pierre en l'état,
ni personne pour le raconter :
on retrouva les cadavres de femmes enceintes
avec leur fœtus s'échappant d'une blessure au ventre.
On retrouva des gosses de cinq ans et moins
pendus par les tripes aux branches d'un arbre.
Les anciens du village,
les vénérables,
avaient la tête tranchée sur la place de l'église.
Il ne restait plus même une voix pour raconter tout ça.
Plus seulement un chien.
Et la presse, la radio et la télévision
répétaient, aujourd'hui lundi, le sermon du dimanche
de sa Majesté Président
– général et pasteur évangéliste –
qui avait commencé en nous disant :
« Dieu est Amour, mes frères... »
*
3. Mapa con una piedra
Aquí queda el océano: los pesqueros que abandono Somoza.
Aquí, la costa: el algodón, bananos, caña de azúcar, caucho,
cacao, ganado y paludismo.
Mas acá, el altiplano, las fincas de café y de cardamomo.
Y mas acá, hasta arriba, se encuentran la montaña y las tierras
estériles.
Y en esta aldea miserable de indios
—de indios que en la cosecha bajan al altiplano o a la costa,
en camiones de vaca, con toda la familia, por salarios que ya
ni madre tienen.
a labrar los millones que se quedan
en bancos y burdeles de Miami;
de indios que van cargando a mecapal la historia—
en esta aldea, digo,
en este simple patio de tierra apisonada,
un niño juega con una piedra.
Con una piedra.
Con una sola piedra.
El silencio, de pronto, decapita la canción de los pájaros.
Y el niño sigue jugando con una piedra.
Los arboles presienten el peligro. El maíz se acongoja en la
mazorca.
Hay un temblor de muerte en los celajes. El agua se detiene
en el cauce del río.
Y los perros esconden el olfato. Pero el niño
en el patio
esta jugando con una piedra.
Es un ruido en pedazos que se oye desde lejos,
retaceado,
indeciso.
Viene como cortando con hachazos metódicos el aire.
Las mujeres levantan la mirada
y corren con un niño en el pecho, y otro niño en la espalda y
otro niño en el vientre,
y un niño mas colgando en cada brazo.
Los viejos sacan fuerzas de flaqueza, escarban en los reumas
hasta hallar los pedazos
de energía que quedan y corren o se arrastran mas bien.
Los helicópteros están sobre los ranchos, las casas, las calles,
y los patios.
Las llamas de napalm roen los techos de amable paja,
el campanario de la iglesia estalla,
los perros cabalgados por el fuego revientan en aullidos,
el paisaje se borra en el humazón caliente.
Vuelven los helicópteros.
Esta vez se declara el aguacero torrencial de balazos,
las cortinas que vienen barriendo lo que queda de vida entre
las brasas
y acosando en seguida la montaña
donde los trajes imperiales de las mujeres sirven de objetivo
seguro.
—perseguido-encontrado-perseguido-encontrado y alcanzado—
por la eficacia de los artilleros.
Y el niño esta en el patio sin su piedra.
Termino el juego
cuando aun tuvo tiempo de lanzarla
contra los helicópteros.
En este mapa ardiente que describe mi patria
ya no existen niños:
desde que el hombre nace, nace adulto.
Adulto y combatiente.
-
3. Carte avec une pierre
Ici, l'océan : les bateaux de pêche qu'abandonna Somoza.
Ici, la côte : le coton, les bananes, la canne à sucre, le caoutchouc,
le cacao, le bétail et le paludisme.
Par là, l'altiplano, les exploitations de café et de cardamone.
Et par là, jusqu'en haut, les versants montagneux et terres stériles.
Et dans ce hameau misérable d'indiens
–d'indiens descendant récolter jusqu'à l'altiplano, ou même la côte,
la famille entière entassée dans des fourgons à bestiaux, pour des salaires
qu'ils finissent par ne toucher plus qu'en rêve.
tous à bûcher pour les millions qui resteront
dans les banques et bordels de Miami ;
d'indiens charriant sur leurs épaules fourbues l'histoire–.
dans ce hameau, vous dis-je,
dans ce simple patio de terre damée,
un enfant joue avec une pierre.
Avec une pierre.
Avec une seule pierre.
Le silence soudain décapite la chanson des oiseaux.
Et l'enfant continue à s'amuser avec une pierre.
Les arbres pressentent le danger. Le maïs se rétracte
dans l'épi.
Un tremblement de mort parcourt les cieux. L'eau s'immobilise
dans le lit de la rivière.
Et les chiens cachent leur flair. Mais l'enfant
dans le patio
continue à jouer avec une pierre.
Un bruit haché se fait entendre dans le lointain,
entrecoupé,
comme hésitant.
Il semble arriver taillant l'air à coups de hache méthodiques.
Les femmes lèvent les yeux au ciel
et prennent la fuite, un enfant collé à leur sein,
un autre enfant arrimé sur le dos, un autre encore
est dans le ventre, un de plus dans chaque bras.
Les vieux grappillent des forces à leur faiblesse, grattent leurs rhumatismes
jusqu'à dénicher les lambeaux
d'énergie subsistant et courent, ou non, plutôt ils rampent.
Les hélicoptères survolent les fermes, les maisons, les rues
et les patios.
Le napalm en feu ronge les toits de paille aimable,
le clocher de l'église éclate,
les chiens, chevauchés par les flammes, hurlent à la mort,
le paysage s'efface, envahi par la fumée chaude.
Retour des hélicos.
Début de la pluie torrentielle de balles.
Les rideaux maintenant balaient ce qui reste de vie entre
les braises,
puis ils vont ratisser, après ça, la montagne,
où les vêtements colorés des femmes servent aux
tireurs d'objectif sûr.
–traqué-trouvé-traqué-trouvé puis atteint–
par l'efficacité des artilleurs.
Et le gamin dans le patio n'a plus sa pierre.
Il a dû mettre un terme au jeu
après avoir quand même trouvé le temps
de la jeter sur les hélicoptères.
Sur la carte embrasée qu'est devenue ma patrie
il n'y a plus d'enfants :
sorti du ventre à peine, on est adulte.
Adulte et combattant.
*
4. La hora de la siembra
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Recibimos el golpe en la mejilla,
la patada en la cara.
Y pusimos la otra mejilla,
silenciosos y mansos,
resignados.
Entonces comenzaron los azotes,
comenzó la tortura.
Llego la muerte.
Llego noventa mil veces la muerte.
La labraban despacio,
riéndose,
con alegría de nuestro sufrimiento.
Ya no se trata solo de nosotros los hombres.
El saqueo constante de nuestras energías,
el robo permanente del sudor
—en cuadrilla, a mano armada, con la ley de su parte—.
Ya no se trata solo de la muerte por hambre.
Ya no se trata solo de nosotros los hombres.
También a las mujeres,
a los hijos,
a nuestros padres y a nuestras madres.
Los violan, los torturan, los matan.
También a nuestras casas,
las queman.
Y destruyen las siembras.
Y matan las gallinas, los marranos, los perros.
Y envenenan los ríos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Trabajábamos.
Trabajábamos mas allá de las fuerzas.
Empezábamos a trabajar cuando aprendíamos a caminar
y no nos deteníamos sino al momento de morirnos.
Nos moríamos de viejos a los treinta años.
Trabajábamos.
El sudor era un río que se bifurcaba:
de un lado se volvía miseria, fatiga y muerte para nosotros:
de otro lado, riqueza, vicio y poder para ellos.
Sin embargo,
seguimos trabajando y muriendo siglo tras siglo.
Pero ni aun así se ablandaban sus caras frente a nosotros.
Vinieron con sus armas
y sus armas vinieron a matarnos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y hemos tenido que empuñar las armas
también nosotros.
Al principio eran las piedras,
las ramas de los arboles.
Luego, los instrumentos de labranza,
los azadones, los machetes, las piochas,
nuestras armas.
Nuestro conocimiento de la tierra,
el paso infatigable,
nuestra capacidad de sufrimiento,
el ojo que conoce y reconoce cada hoja,
el animal que avisa,
el silencio que aprieta las quijadas.
Esas fueron primero nuestras armas.
No teníamos armas.
Ellos si que tenían:
las compraban con nuestro trabajo
y luego las usaban contra nosotros.
Ahora tenemos armas:
las de ellos.
Cuando vinieron nocturnos a matarnos
les salimos al paso,
caemos como rayos
y tomamos las armas,
agarramos las armas.
Cada fusil cuesta muchas vidas.
Pero son mas las muertes que nos cuesta
si sigue en manos de ellos.
Y no nos han dejado otro camino.
Y esta bien que así sea.
Porque esta vez
las cosas
van a cambiar definitivamente.
Están cambiando.
Ya cambiaron.
Cada bala que disparamos lleva
la verdad del amor por nuestros hijos,
por nuestras mujeres y nuestros mayores
y por la tierra misma y por sus arboles.
Y por eso hay mujeres y niños combatiendo junto a nosotros.
Cuando sembramos el maíz,
sabemos que deberán pasar lunas y soles
hasta que la mazorca sonría con sus granos y se vuelva alimento.
Y cuando disparamos nuestras armas
es como si sembráramos
y sabemos
que deberá venir una cosecha.
Tal vez no la veamos.
Tal vez no comeremos nuestra siembra.
Pero quedan sembradas las semillas.
Las balas que ellos tiran solo llevan muerte.
Nuestras balas germinan,
se vuelven vida y libertad,
son metal de esperanza.
Las cosas han cambiado.
Y esta bien que así sea.
Hemos limpiado y aceitado el arma.
Echamos las semillas en la alforja y emprendemos la marcha
serios y silenciosos por entre la montaña.
Es la hora de la siembra.
-
4. L'heure de semer
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous avons reçu le poing dans la joue,
le coup de pied dans la figure.
Et nous avons tendu l'autre joue,
silencieux et dociles,
résignés.
Alors ont commencé les coups de fouet,
puis la torture.
La mort est arrivée.
Quatre-vingt-dix mille fois la mort est arrivée.
Ils la distribuaient à petit feu,
en se marrant,
n'oubliant pas de jouir de notre souffrance.
Il n'est plus question seulement de nous les hommes.
Le pillage constant de nos énergies,
le vol permanent de la sueur
– en escadrons, la main armée, avec la loi de leur côté –.
Il n'est plus question seulement de mourir de faim.
Plus question seulement de nous les hommes.
Les femmes également,
les enfants,
nos pères et mères.
Ils les violent, ils les torturent, ils les tuent.
Nos maisons aussi,
ils les brûlent.
Et ils détruisent les plantations.
Et ils tuent les poules, les cochons, les chiens.
Et ils empoisonnent les rivières.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous travaillions.
Nous travaillions au-delà de nos forces.
Nous commencions à travailler quand nous apprenions à marcher
et jamais ne nous arrêtions jusqu'à l'article de la mort.
Nous mourions de vieillesse à l'âge de trente ans.
Nous travaillions.
Le fleuve de la sueur se séparait en deux :
d'un côté, il devenait misère, fatigue et mort pour nous :
de l'autre, il devenait richesse, vice et pouvoir pour eux.
Cependant,
nous avons continué à travailler, siècle après siècle.
Mais leurs traits, face à nous, ne se sont pas adoucis pour autant.
Ils sont venus avec leurs armes
et leur armes sont venues pour nous tuer.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et nous avons dû empoigner les armes aussi,
nous autres.
Au début il y avait les pierres,
les branches des arbres.
Les outils de travail du sol, bientôt.
Bêches, machettes et pioches,
nos armes.
Le savoir de la terre,
le pas infatigable,
notre capacité d'endurance,
l’œil qui connaît et reconnaît chaque feuille,
l'animal qui avertit,
le silence qui serre les mâchoires.
Voilà quelles ont été nos premières armes.
Nous n'avions pas d'armes.
Eux qui, par contre, en possédaient,
les achetaient à la sueur de notre travail
et les utilisaient, après ça, contre nous.
Maintenant nous avons des armes :
les leurs.
Quand ils sont venus nous tuer, en pleine nuit,
nous sommes passés à la contre-offensive,
nous surgissons comme des rayons
et nous prenons les armes,
nous empoignons les armes.
Combien de nos vies arrachées pour un fusil ?
mais le prix est plus grand encore en morts,
si l'arme demeure à leur poing.
Et ils ne nous ont pas laissé d'autre chemin.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Parce que cette fois-ci
les choses
vont changer définitivement.
Elles sont en train de changer.
Elles ont déjà changé.
Au fond de chacune des balles que l'on tire
vibre l'amour sincère de nos enfants,
de nos femmes et de nos anciens,
de la terre vénérée et de ses arbres.
C'est pour cela que des femmes, des enfants combattent à nos côtés.
Quand nous semons le maïs,
nous savons que passeront plusieurs lunes, plusieurs soleils,
avant que l'épi ne sourie avec ses grains, devenu pour nous aliment.
Et quand nous tirons des coups de feu,
c'est comme si nous semions,
et nous savons
que viendra forcément une récolte.
Peut-être que nous ne la verrons pas.
Peut-être que nous ne mangerons pas le fruit de nos semailles.
Mais les graines restent en terre, prêtes à éclore.
Leurs balles à eux apportent la mort.
Les nôtres germent,
deviennent vie et liberté,
sont métal d'espérance.
Les choses ont changé.
Et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Nous avons lavé et huilé l'arme.
Nous jetons les graines dans nos sacoches et commençons la marche
sérieuse et silencieuse dans la montagne.
C'est l'heure maintenant de semer.
*
5. Equis-equis
- No, no es él.
- Sí, sí es él.
- No, no es él. No es posible que esto pueda ser él.
- Mira la cicatriz de la vacuna.
- No, no es él.
- Mira la corona de la muela que le puso Miguel
hace seis meses.
- No, no es él.
- Yo pienso que sí es él. Que esta vez si es él.
- No, no es él.
Como podría ser él si no tiene ojos.
Como podría ser él si no tiene sus manos laboriosas.
Como podría ser él si le han cortado sus semillas de hombre.
Como podría ser él sin su guitarra ni su canción,
sin aquel ceño duro ante el peligro, sin aquella sonrisa en el
trabajo.
sin su voz pronunciando el pensamiento, sin su tonta manía
de regalarme flores.
Como podría ser él.
No es él. Te digo que no es él.
No quiero que sea él.
-
5. Double x (corps non-identifié)
- Non, c'est pas lui.
- Si, c'est lui.
- Non, c'est pas lui. C'est pas possible que ce soit son corps, là.
- Regarde, on voit la cicatrice de son vaccin.
- Non, c'est pas lui.
- Mais si, c'est la couronne que Miguel lui a mise, il y a six mois.
- Non, c'est pas lui.
- Moi, je crois bien que, cette fois, si, c'est lui.
- Non, c'est pas lui.
Comment tu peux dire que c'est lui, s'il n'a même plus ses yeux.
Comment tu peux dire que c'est lui, s'il a perdu ses mains de travailleur.
Comment tu peux dire que c'est lui, sans sa guitare et ses chansons,
sans son sourcil durci face au danger, sans le sourire qui
lui venait en travaillant.
sans le son de sa voix prononçant sa pensée, sans sa manie stupide
de m'offrir des fleurs.
Comment tu veux que ce soit lui.
C'est pas lui. Je te le dis : non, c'est pas lui.
Je ne veux pas que ce soit lui.
Source : Fuego de fuego : http://fuegodelfuego.blogspot.fr/2015/09/poemes-politiques-posthumes-de-manuel.html
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